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Cette perception corporelle rend Jeanne aussi certaine de la présence de ses ‘’Voix’’ que de celle de ses juges en face d’elle.

 

Cette vision corporelle de l’ange et des deux saintes est en profonde harmonie avec toute la spiritualité tellement incarnée de Jeanne : Jeanne est vraiment ‘’ dans le plein de l’Incarnation’’. Cette perception corporelle rend Jeanne aussi certaine de la présence de ses ‘’Voix’’ que de celle de ses juges en face d’elle. Mais il faut bien reconnaître que la certitude absolue de Jeanne au sujet de ses révélations et de leur origine – elles viennent ‘’de Notre-Seigneur’’ – présente un caractère extrême et assez inhabituel. A plusieurs reprises, Jeanne affirme qu’elle est aussi certaines de ses révélations que des vérités de la foi.

Mais puisque ces visions corporelles ont souvent été un peu méprisées par les théologiens, considérées comme inférieures à celles qui sont purement spirituelles, intellectuelles, et donnant plus facilement prise aux illusions diaboliques, il ne sera pas hors de propos de citer un très beau texte de saint Thomas d’Aquin, qui réhabilite parfaitement la vision corporelle d’un ange (il s’agit de l’ange Gabriel à l’Annonciation) :

‘’ A l’Annonciation, l’ange apparut à la Mère de Dieu dans une vision corporelle. Il convenait qu’il en fût ainsi :

Premièrement, en raison de ce la même qui était annoncé ; en effet, l’ange Gabriel était venu annoncer l’Incarnation du Dieu invisible ; pour la manifestation d’une telle réalité, il convenait donc qu’une créature invisible prît une forme pour apparaître visiblement. D’ailleurs toutes les apparitions de l’Ancien Testament étaient ordonnées à cette apparition selon laquelle le Fils de Dieu apparut dans la chair.

Deuxièmement, cela convenait à la dignité de la Mère de Dieu qui devait concevoir le Fils de Dieu non seulement dans son esprit mais aussi dans son sein corporel. Ainsi non seulement son esprit mais encore ses sens corporels devaient-ils être réconfortés par la vision angélique.

Troisièmement, cela convenait à la certitude de ce qui est annoncé. Nous saisissons de façon plus certaine ce que nous voyons de nos yeux que ce que nous percevons avec l’imagination’’ (IIIa, Q.30, art.3)

François-Marie Léthel, Connaître l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance La théologie des saints, Éditions du Carmel, Vénasque, 1989, p. 321-322